you and i (ismaël)

S'il y a bien une chose à laquelle Ismaël ne s'attendait certainement pas ces derniers temps, c'était de recevoir un appel d'elle. Les fesses posées sur une dune de sable tiède, il s'adonnait à sa passion première – le dessin -  lorsque la sonnerie de son téléphone retentit. En plein croquis d'un enfant jouant sur la plage à plusieurs mètres de lui plus bas, sa première réaction fut de ne pas répondre et poursuivre ainsi ses coups de crayons déjà bien entamés. C'est ce qu'il appelait chez lui la léthargie de la création. En effet, parfois lorsqu'il dessinait, plus rien autour n'avait d'importance si bien qu'il pouvait oublier jusqu'à la notion même de temps. Cependant, une petite voix dans sa tête le poussa à arrêter son entreprise et fouiller dans son sac à dos afin de dénicher l'objet à la cacophonie dérangeante. C'est là que son cœur s'arrêta l'espace d'un instant. Siddhi. Le portable dans la main, il resta figé dans son élan avant de finalement décider de le porter à son oreille. C'est là que cette douce voix familière retentit, s'infiltrant dans ses veines comme une traînée de poudre pour s'enflammer jusqu'au creux de ses reins lorsque cette dernière prononça juste son prénom. C'était si bon de l'entendre. Elle voulait qu'ils se voient rapidement, cela semblait urgent. Ismaël hésita presque un instant ; la peur qu'on les aperçoive ensemble et que l'information remonte à ses parents n'était pas une chose aisée à oublier. C'est en comprenant qu'ils se retrouveraient dans un café en dehors de la ville que le garçon accepta l'invitation avant de raccrocher et de laisser tomber à même le sable, le portrait qu'il avait presque terminé. Un écho de sourire aimant venait de s'afficher aux commissures de ses lèvres.

Le lendemain, la journée passa rapidement jusqu'à l'heure du rdv. Ismaël prit discrètement sa voiture en direction de l'adresse donnée, l'esprit ravagé de pensées en tout genre. Pourquoi maintenant ? De quoi voulait-elle parler ? Mais bizarrement surtout, Comment allait-elle depuis trois mois ? Était-elle en aussi mauvais état que lui ou alors avait-elle repris le cours de sa vie comme si de rien était ? Tout ça il le saurait bientôt car le voilà qui se garait non loin de l'établissement. La  pluie tombait en trombe autour de lui et manque de bol il n'avait pas pensé à prendre un parapluie. Qu'à cela ne tienne, ce ne sont pas de grosses gouttes d'eau qui allait l'empêcher de la rejoindre. Il se dépêcha d'atteindre l'entrée avant de s'ébouriffer la tignasse déjà mouillée à l’entrebâillement de la porte. Dans ce même geste, il observa les environs et finit par tomber sur ces yeux ébènes qu'il chérissait tant. Là voilà. Un sourire sincère illumina ses traits. Siddhi se leva à son arrivée et dans un geste gauche les deux ex s'invitèrent mutuellement à une accolade passable pour cette occasion. L'odeur enivrante de son parfum caressa de nouveau les narines de l'étudiant. C'était si bon pour lui de la revoir. Trois mois c'était long. « Oui, trop longtemps.. », ne put-il s'empêcher de répondre de manière niaise en s’asseyant juste en face d'elle, ses mains se retenant d'un quelconque geste déplacé à son encontre. Un rictus presque gêné apparu sur sa bouche. « Désolé si je t'ai mouillé, il fait un vrai temps de chien dehors comme tu peux t'en rendre compte », poursuivit-il histoire de briser la glace. C'était si étrange et euphorique de la revoir si près. « Mais sinon, comment est-ce que tu vas ? », finit-il par demander en essayant de comprimer un flot d'émotions redoutables.